Quand la Moselle rencontre la Seine…
06 Août 2017 (Dimanche)
Les 6 heures de Paris 2017

174 bornes en Bont Jet 2 pts Platines 3x125 Powerslide XXX 12.6" roues Matter One20Five F0 Wide shape usées en 124,5 + cales 2 mm
Soit environ 28,8 kmh de moyenne pour un tour à 2,4 km
Attention, la longueur du tour varie selon les sources :
2,6 km selon l'orga, 2,3 km selon mon tracé openrunner, et 2,4 km selon le compteur d'un cycliste. Je pense que c'est cette dernière valeur qui est la plus précise.
Cette incertitude empêche de définir le deuxième chiffre après la virgule (le chiffre des dizaines) puisque même le chiffre des centaines n'est pas clairement défini !
Or, à 3 jours de l'épreuve, alors que je suis très en forme, je me ramasse une grosse gamelle en roller.
C'était donc jeudi matin, en trajet urbain entre le parking et mon bureau, au Luxembourg.
Évidemment, je ne portais aucune protection (grosse erreur) alors qu'en entraînement sur la piste, je porte toujours le casque.
Alors que je passe au niveau d'un camion garé, des gars en train de décharger m'obligent à faire un virage un peu hasardeux au dernier moment ;
Je tombe vers l'avant mais mon visage est réceptionné par la très solide carrosserie d'une voiture garée.
Bilan : la pommette et l'arcade sourcilière gauches bien amochées (mais pas fracturées) et surtout la paupière gauche déchirée, et ça pisse le sang.
Les genoux dermabrasés (surtout le droit) ainsi que le coude droit (légèrement).
Douleurs consécutives au choc dans les épaules (surtout la gauche) qui ont tenté d'amortir le choc.
La tête lourde pendant 2 jours, et des douleurs lombaires qui se réveillent car j'ai dû me cambrer fortement dans cette chute.
Enfin, une baisse de ma tonicité générale, entamée par un processus de guérison tout juste initié.
Pas de roller du tout par conséquent pendant les 3 jours qui précèdent l'épreuve, en espérant que mon corps ait le temps de réagir face à ces blessures.
Et me voilà avec un nouveau look de boxeur avec cette pommette croûtée + strip blanc.
Sanglier passe me prendre en voiture (de location) samedi 13h en bas de chez moi à Ennery.
13h, ça va, on est dans les temps... En fait, on craint que ça bouchonne un peu sur Paris, avec les chassés-croisés des vacanciers, et aussi, il y a un match au Parc des Princes...
Mais finalement à part quelques ralentissements sur le périph, ça roule assez bien.
Vers 17h on se pointe à l'Hôtel Kyriad à Boulogne-Billancourt, entre Seine et Bois de Boulogne et on s'installe.
Je vais me balader seul sur les quais de Boulogne, tandis que Sanglier répond à l'invitation de Sixties d'aller prendre un pot en ville, avec Laurent Zerr, Roller 2B et d'autres.
Pour ma part je préfère me coucher tôt, aussi je reste dans mon coin.
Un coin de Seine très sympa, avec beaucoup de verdure, et j'en profite pour faire une série de photos. Je me fais 2 heures de marche très lente en tongs.
Je rentre à l'hôtel vers 18h, mange et prends une douche, et repars pour une autre heure de marche à pieds.
ça fait beaucoup de marche, mais découvrant ce coin parisien, je n'ai carrément pas senti le temps passer.
Après une excellente nuit je me réveille vers 5h30 du matin, bien en forme, et je prépare mes affaires.
Avec Sanglier on quitte l'hôtel vers 9h00, direction Bois de Boulogne, où l'on se fait héler plusieurs fois de bon matin.
On se pointe enfin sur le spot et on installe notre Q.G. parmi plusieurs centaines de personnes déjà présentes.
Igor arrive aussi, au volant, avec son fils pour passager, qui l'aide pour le ravito.
Ayant remarqué que mes transitions de carres, mon balancier et mon retour de patin se faisaient plus aisément en Thin qu'en Wide, je craque pour un jeu de G13 125 F0 flambant neuf chez Nathalie Barbotin.
De toutes façons j'avais prévu mon coup : j'avais apporté roulements en entretoises que je monte illico, et je pars tout aussi illico pour quelques tours de reconnaissance.
Le parcours se déroule ainsi : Une portion d'avenue en ligne droite, en plein soleil, où sont les stands et la ligne d'arrivée, moyennement roulante car un peu grattonneuse.
Puis virage à gauche dans une rue ombragée et plus étroite, bien lisse.
Encore un virage à gauche en sautant une bordure qu'on se prend en biais (danger) dans un chemin forestier, toujours plus étroit, encore plus ombragé, et sinueux.
Les bas-côtés sont couverts de feuilles mortes reposant sur un lit de terre sèche et meuble, où l'on plante assez facilement les roues.
(je sais : j'ai testé un arrêt "en brousse" pour pause pipi qui s'est soldé par un enlisement jusqu'aux platines)
Ce lieu a d'ailleurs été le théâtre de quelques chutes pour cause de sortie de route.
Faut dire que le passage est étroit, ce qui n'empêche pas de prendre de la vitesse. Effet tunnel garanti.
Ensuite carrefour "sécurisé", avec staff des 6h de Paris, petites bordures à franchir (qui cassent les pieds), virage à angle droit vers la gauche, avec protection charpentée en bois, au sol dans le virage, pour permettre de "couper" un peu dans la terre (encore quelques vautrages en règle à cet endroit, ensuite rue très lisse et roulante, avec prise de vitesse à la faveur d'un vent favorable à cet endroit, puis carrefour hyper craignos : la rue est en pente, rejoint l'avenue de départ, il faut tourner vers la gauche dans l'avenue, heureusement large, mais ça grattonne, et surtout, quand il y a du monde, c'est un peu la loterie : Qui va y laisser sa peau cette fois-ci ?
Bref, je finis ma reconnaissance avec un peu d'appréhension.
Pour compenser, les roues que j'ai aux pieds sont super roulantes, je suis haut sur pattes car c'est du plein diamètre 125, c'est fin, nerveux, c'est top.
Je me suis préparé 5 gourdes de 650 ml de boisson isotonique Isostar Hydrate & Perform (2,5 dosettes par 650 ml) + une bonne pincée de sel dans chaque, car la chaleur, bien que raisonnable (26°C), va solliciter un peu le corps.
Cependant les 3/4 du parcours sont ombragés, ce qui est un avantage.
Sixties fait partie du staff de bénévoles, ce qui ne me surprend pas : ce gars est la générosité incarnée. Pompier bénévole dans le "civil", staffeur bénévole dans le sport. Mais Sixties ne s'est pas contenté d'aider l'organisation, il s'est aussi pleinement investi dans le soutien moral et logistique des troupes, à savoir Simon et moi-même.
En effet, il se propose de nous passer la boisson, ce qui est déjà formidable, mais, comme on va le voir, il fera bien plus encore...
J'aperçois Bankowsky, qui parle avec ses amis. J'arrive juste à temps pour l'entendre dire que "la Chine, c'était super". Ah ok, j'y suis : en effet aux dernières nouvelles, j'avais ouï dire que Bankowsky était en Chine il y a quelques jours à peine.
Mais voici que l'organisation annonce au micro l'imminence du départ...
En ce qui concerne les solos, ils peuvent au choix partir déchaussés, comme tout le monde (car c'est encore une fois un départ "Le Mans"), soit partir chaussés, mais dans ce cas, ils doivent attendre 2 minutes après le signal du départ.
Igor et Bankowsky choisissent cette dernière option. De toutes façons, ils sont tellement rapides qu'ils rattraperont les autres quand même.
Simon et moi-même décidons de partir déchaussés.
Top départ. On court vers le trottoir opposé et on se met à chausser frénétiquement. J'observe Simon qui semble dans les mêmes temps que moi... Erreur, il part 5 secondes avant moi. Je détalle pour le recoller, pas moyen, il file à fond la caisse.
Bon, me dis-je : il va me dépasser dans combien de temps, maintenant ?
On file serrés comme un banc de sardines par la piste étroite. On est trop nombreux à chaque passage dangereux. Dès le début, ça chute. Un gars s'étale devant moi : plaffff !L'ambulance prend du service quasi immédiatement. Est-ce que tout ce monde peut passer par là, me dis-je parfois. Non, vraiment non. Sorties de route, collisions, emmélage de patins, ça écrême.
Au fil des tours, la population roulante se réduit un peu, rendant le parcours plus rapide encore.
Au bout d'une heure seulement, voici Igor, Simon et deux autres gars que je ne connais pas, qui me dépassent. Je m'accroche à leur rythme et là encore, je passe à la vitesse supérieure.
Les négociations avec les virages dangereux sont bâclées. À chaque fois, ça passe limite, le groupe de tête me distance, car ils se prennent les virages vraiment vite, puis je relance et les recolle aussi sec. Et ça dure ainsi une petite heure.
Puis je veux faire le mec sympa, qui ne se contente pas de rester dans l'aspi : je passe devant.
Entreprise risquée. Je reste devant même pas un tour entier, durant lequel je m'explose le cardio, puis les gars me repassent devant, et impossible de le recoller.
Voilà, ça m'apprendra à jouer les gars sympa. Bon, sur ces entrefaites me revoilà seulâbre et le doute s'instaure dans mon esprit, je baisse en tonicité.
Je parviens quand même à accrocher quelques équipes, mais les lombaires sont en train de me poignarder le dos, et ça ne veut plus me lâcher.
À chaque passage délicat où il est de bon ton de ralentir, j'en profite pour me relever.
Le sous-bois est frais, calme, reposant, mais étroit et très rapide. Le staff a un boulot énorme pour empêcher les promeneurs de traverser n'importe où. Ils peuvent déboucher de n'importe quel sentier forestier. Qui une joggueuse parigote avec son chihuahua dans les bras, qui une petite rando vélo...
Peu avant le virage dangereux sur plaques en bois, des nids de poules sont en train de se former au milieu de la piste. Ils avaient pourtant été bouchés au ciment la veille au soir, mais l'ouvrage n'a pas résisté longtemps au pilonnage intensif de 600 patineurs multiplié par 6 ou 8 roues.
Donc à un moment ils ont dû bomber les trous en orange fluo, les combler à nouveau et les plaquer à l'aide de feuilles métalliques scotchées au sol, et là, ça a tenu jusqu'à la fin.
Merci à ce gars du PUC roller (qui est si rapide) et que j'ai vu se trimballer les plaques durant la course. En fait, il a été un peu à tous les postes à la fois.
Comme prévu, encore une heure plus tard, revoici Igor... mais sans Simon. Il semblerait que ce dernier ait dû faire une pause.
Cela me redonne espoir. Autre détail, et pas des moindres, il ne me semble pas m'être jamais fait dépasser par Bankowski. Lui aussi, paraît-il, ferait une pause, mais vraiment une très très longue pause.
Cela aussi me donne quelque espoir, mais je ne connais pas les autres solos potentiellement dangereux.
Conséquence directe du départ "Le Mans" : Pied droit beaucoup trop serré, douleurs sur face supérieure et latérale externe. Je dois faire 2 ou 3 mini pauses express afin de soulager, en déssérant lacets et boucle micro.
Ces ajustements sont effectués à temps, avant que la douleur n'empire et ne devienne blessure.
La quatrième heure est dure, pleine de doute, mais à chaque tour, Sixties est là pour m'encourager.
Et c'est là que ce cher Sixties me dit les mots magiques : "Gui-gui, t'es 2eme, avec 2 minutes d'avance !"
ça me fait un électro-choc. Moi, deuxième ? 2 minutes d'avance ? Mais sur qui ?
Ma grande perspicacité et mon esprit de déduction aiguisé me suggèrent que ces 2 minutes d'avance-là sont prises sur le 3eme solo homme.
Mmmmouais, c'est plausible. ça tient la route.
Montée d'adrénaline, de testostérone, de speed et de détermination : Eh bien, me dis-je, je ne laisserai personne être 2eme à ma place.
En effet, être 2eme juste après le Grand Igor des Steppes Kazaques est un privilège et un honneur dont je ne me laisserai point déposséder. J'envoie tout ce que je peux.
Ce qui n'empêche pas Igor le Grand de me déposer - avec respect - le long de l'Avenue, me gratifiant d'un : "Allez, Gui-gui !" ...Ouais, Igor !...
Mais toujours point de Simon en vue. Sixties me balance une nouvelle info : J'ai maintenant 3 minutes d'avance !
Oui, comme quoi mes efforts sont payants. "Ne lâche rien, champion" me lance encore Sixties, à chaque tour. Ses passages de bidon sont impec, et le choc du bidon plein dans ma main agit comme un coup de fouet.
Vers 30 minutes avant la fin, Sixties m'annonce que je vais "mettre un tour au troisième".
Mes forces sont décuplées et je me surprends à recoller certaines équipes de la première heure.
J'ai vu, à un moment, passer Bankowski et Igor (B. devant), et je me demande alors vraiment ce qu'il est en train de faire de son 6h, car c'est la seule fois où je l'ai vu rouler.
Sanglier est en super forme, à aucun moment il ne s'arrête, et conserve son allure tout au long de l'épreuve.
Du coup ses tuyeaux sont moins frais que ceux de Sixties qui lui a accès aux ordis de l'orga.
Roller 2B, également, que je ne pouvais pas louper, avec son "Corsica" dans le dos.
Domi, Assem, que je félicite pour sa 3eme place en duo au Mans, et tous les autres dont les noms me sont inconnus mais dont je n'oublie pas le visage et l'allure.
2 tours avant la fin : je rattrape Simon, qui se trouve dans un train que je dépasse. Il se colle derrière moi, et on roule fort pour le final.
Simon me passe devant dans le dernier tour en me coupant le vent. Arrivé à l'Avenue, on se sépare, et chacun y va à fond pour le finish.
Encore une fois, il est plus rapide que moi et franchit la ligne.
Mais, je suis toujours 2eme, car le 3eme n'est pas Simon, mais un autre gars, que je ne connaissais pas, et qui a dû rouler rapidement en pelotons en s'octroyant quelques pauses.
Sixties jubile : "2eme, c'est super !" Et moi aussi je suis vraiment super content, parce que ça a été dur, jusqu'à la fin, avec des moments de doute, du suspens et tout et tout...
Seulement, au niveau informatique, il y a un gros bug. Sur une liste, je suis 2eme, sur une autre, 3eme. Des équipes aussi ont des soucis de classement.
Pourtant, les podiums sont annoncés et tenus dans l'erreur, et je me vois attribuer la 3eme place.
Les lots sont distribués et les gens commencent à rentrer chez eux.
Puis, l'organisation se rend compte de son erreur et, moyennant ses plus plates excuses, annonce que de nouveaux résultats vont être donnés, le temps que les ordinateurs recalculent tout.
C'est ainsi que les Séniors femmes, Séniors hommes, ont dû monter 2 fois sur le podium. Et Valino était là : le long, filiforme, sec et rapide Valino de La Rochelle.
Même Yann Guyader et Guillaume de Mallevoue sont passés par là. Ils étaient là un peu en "Guest Stars", il ne se sont pas attardés.
J'ai donc une explication sur l'origine de ces fabuleux trains qui ont filé vers la fin de la course.
Le gars de l'orga, qui parle dans le micro est tout confus et désolé pour ces erreurs.
Mais les rectificatifs eux-mêmes ont été faits à la va-vite, car dans sa précipitation, il a oublié les solos hommes.
Bon, pour Igor, pas de souci, il est 1er. Par contre, je le vois devant moi appeler sur son portable le 2eme solo homme pour lui dire que désolé, il n'est pas 2eme mais 3eme, et est-ce que tu pourras me ramener ton lot ?
Moi-même j'ai rendu mon lot de 3eme. Ce n'est pas du caprice, c'est juste que nous, on s'est vraiment défoncé pour faire une certaine place et pas une autre et on y tient.
Sanglier a battu son propre record : 132 km. Lui aussi tient à ce que soient rétablies les exactes valeurs du classement.
Bien, congé est pris de tous ces amis du roller, et avec Sanglier on marche à grand-peine vers le parking du Bois de Boulogne.
Le temps de déposer un copain à la Gare de Lyon, ce qui nous occasionne une belle traversée de Paris via le Troca et la tour Eiffel, et on se prend l'autoroute A4 pour le Nord-Est.
Il se fait tard, toutes ces tergiversations ont pris un temps considérable.
Douche dans une station de l'autoroute, le soir tombe, Sanglier ne trouve plus ses lunettes de vue...
Je prends le volant et on arrive chez moi vers 23h30.
Alors que je rentre enfin chez moi, Sanglier se conduit vers Thionville.
Dodo !