
Sanglier76, Laurent Zerr, gui_gui
Les 6 heures de Strasbourg (Dimanche 03 Septembre 2017)
Tracé :
http://www.openrunner.com/index.php?id=7784045
2,165 km (2,2 selon l’orga)
En Bont Jet 2 pts Platines 3x125 Powerslide XXX 12.6» roues Matter G13 F0 Thin shape usées en 124,5 mm + cales 2 mm
Après Colmar, je me suis fait 2 jours de repos complet, puis un jour avec 36 km mais pas à fond, puis encore 3 jours de repos.
Le dernier jour de repos est vraiment dur. Ben oui, se reposer, ne rien faire, c’est dur. Je sens tout mon corps qui crie pour de l’activité et moi je lui dis : non, couché !
La météo a changé : on passe progressivement des fortes chaleurs à un temps automnal, nuageux, frais et humide.
Cette fois-ci Sanglier est de la partie, et comme Strasbourg n’est qu’à 1h45 d’autoroute, on décide d’y aller le matin même, tôt.
Il est prévu qu’il passe chez moi à 06h00 du mat dimanche, aussi les jours qui précèdent je m’habitue à me lever très tôt, et aussi à me coucher tôt.
Il y a 12 solos hommes inscrits, dont l’Allemand Fireskater Jochen, qui n’était pas trop en forme à Colmar, sûrement à cause de la chaleur. Sauf qu’en 2015 ce gars-là avait fini les 6h de Strasbourg dans le même tour que Bankowski, avec 180 km... et des conditions fraîches.
LISTE DES SOLOS HOMMES :
Catégorie N°Dossard Nom de l’équipe Nom Prénom
Solo H 401 Fred_PUCKS GODEFROY Frédéric
Solo H 402 Rouliroula Hotwheels VANSTEENKISTE Dany
Solo H 403 Sanglier76 GACHET Aurélien
Solo H 404 NRV du chibre ROUSSEAU Flavius
Solo H 405 NRV pas Xavier DESIR Xavier
Solo H 406 FréroSoloNRV DRAPIER Benoit
Solo H 407 Lolo Solo NRV LESUEUR Loïc
Solo H 408 GUI-GUI DELEGUE Guillaume
Solo H 409 Fireskater Jochen Glasbrenner GLASBRENNER Jochen
Solo H 410 Seul-le-Mans Laurent ZERR Laurent
Solo H 411 Gossipskate SESSEM Assem HENAIDAK
Solo H 412 Pierre-Olivier THERIOT
Or là aussi cette année, il va faire frais. Donc Jochen sera un redoutable adversaire.
Il y a aussi Laurent Zerr, à surveiller.
Le matin à Ennery, il fait 10°C, il ne pleut pas, et le sol est sec, sauf sous les arbres qui piègent un épais brouillard.
Sanglier passe en bas de chez moi un peu avant 06h00, on charge mes affaires dans le coffre, et c’est parti.
Il fait très frais, en approchant de Strasbourg ça chute à 8°C, il y a des nappes de brouillard, et la route est mi-sèche mi-humide.
En arrivant, cependant, on voit que toutes les rues sont bien sèches à Hoenneim (banlieue Nord de Strasbourg)
Nous sommes les premiers coureurs sur le spot. On installe le matos, retire nos dossards/puces au gymnase. Le staff est en plein travail d’installation, les choses dangereuses le long du parcours sont bombées en rouge.
Je fais 2 tours de reconnaissance et constate que le parcours est étroit le long d’une des rues, avec l’autre voie ouverte à la circulation.
Des bottes de paille emballées, surmontées de piquets et tendant une longue banderole de chantier, ont été disposées sur toute la longueur de cette rue.
Le parcours a la forme d’un carré d’environ 550 mètres de côté, donc 2,2 km selon l’orga, mais comme en réalité on serre à la corde, j’ai compté pour ma part très exactement 2,165 km.
Le revêtement est moyen (trous, gratton, coins rapiécés), étroit, à part une rue bien lisse.
C’est une petite course : nous sommes moins de 100 alignés sur le départ, dont Fireskater Jochen, l’Allemand géant qui sera bien sûr mon principal adversaire.
Je retrouve beaucoup de visages familiers, dont beaucoup étaient à Colmar la semaine passée. Enfin on s’aligne pour le départ.
L’ordinateur qui compte les tours connait quelques bugs/ratés et le départ est interrompu au milieu du compte à rebours plusieurs fois, ce qui joue avec nos nerfs.
Dès le départ, je vois Jochen qui me cherche du regard, il s’approche de moi, se cale derrière... et je le tire comme ça pendant une heure complète... Au bout de laquelle je lui demande si ça le branche de passer devant, ce qu’il accepte de bonne grâce. Wow, ce mec est un coupe-vent énorme ! 2 mètres de haut, un gabarit impressionnant, et il envoie du lourd face à un petit vent qui s’avère plus têtu que prévu.
Dans la deuxième heure, Jochen ne fait pas une heure complète devant moi, je repasse devant, un peu au hasard des circonstances.
L’ambulance soudain fait hurler ses sirènes, il y a eu un accident chez les coureurs. Bon sang c’est Assem, alias Sessem. Il est au sol, couché, avec les secouristes autour de lui. Au fil des tours je vais voir une scène terrible : Sessem a les yeux fermés, on le recouvre d’une couverture isolante, le hisse sur un brancard, l’embarque à bord de l’ambulance, et il est évacué rapidement.
Je gamberge, je suis inquiet pour lui, a-t-il perdu connaissance ?
Je ne saurai le fin mot de l’histoire qu’à la fin de la course, comme on va voir.
Combien de fois Jochen et moi avons-nous dû sauter sur le trottoir pour éviter/dépasser des coureurs le long de la rue étroite... comme je fais remarquer à l’Allemand : «This is a Free-Ride Endurance ! « (on se comprend mieux en anglais !)
Or voilà que dans ma tête se dessine un plan machiavélique...
Les tours sont courts...facile de mettre un tour... ou de se le faire reprendre...
Vers 2h45 de course, je chope un des 4 mecs de l’équipe Gossip, et on file comme ça sur 2 tours, Jochen collé derrière moi. «Good train !» que je lui dis. «Yeah, very good !», répond-il.
Et voilà qu’à un relais des Gossip, un des gars plus rapide (le barbu !) arrache très fort. J’envoie la purée et je le colle aussi sec. Virage à droite. Le long de la rue où il y a le tram, vent favorable. Je vole derrière le Gossip. Me retourne : Wow ! Jochen a lâché l’affaire : il est au moins à 250 mètres derrière !
Bon, c’est pas tout ça, mais maintenant que j’ai commencé ce que je suis en train de faire, faut que je le finisse. Car ça sert à rien de cramer du fuel pour moi-même me faire déposer en rase campagne. Mais bon dieu voici que c’est au tour de Robin, des Gossip (qui avait fait 3eme à Nivelles). Selon les propres termes de son équipe, c’est un «lévrier». Foulées longues et amples, rapidité. C’est dur mais je m’accroche, je suis au ras du sol. je suis obligé de caler une foulée courte entre chacune de ses 2 ou 3 foulées, pour rester dans sa roue. Je tiens bon, et voici encore un relais plus cool. Et je suis les relais des Gossip comme ça pendant 7 tours (environ !) jusqu’à ce que j’aperçoive devant moi, en train de passer les stands, Jochen à qui je viens de mettre un tour : je l’ai fait !
Je tape dans le dos du Gossip devant moi et le remercie, et maintenant c’est au tour de Robin, encore. ça arrache, je sais que je ne pourrai plus faire un tour complet à cette vitesse-là : je le laisse me distancer et retrouve Jochen.
Il ne dit rien, mais il sait. On sait tous les deux. Maintenant, la question que tout le monde se pose, c’est : très bien, mais est-ce que je vais résister encore presque 3 heures comme ça ? Pour moi, je sais que la réponse est : oui, bien sûr. Mais je ne bourre plus à mort, je gère ma vitesse, avec néanmoins de bonnes accélérations, dans la limite de ce que je peux me permettre, Jochen derrière moi les 3/4 du temps, je lui demande parfois de passer devant, ce qu’il fait pour 2 ou 3 tours, puis je repasse devant.
Sanglier, que j’ai dépassé à de nombreuses reprises, est tout content pour moi. Il est parfois seul, parfois en train et va à son rythme.
Parfois en mettant un tour à Hilde, accompagnée de Laurent Zerr, ils s’accrochent à nous, mais pas trop longtemps, car notre allure est élevée, vu qu’on chope souvent des patineurs assez rapides.
À un moment, Jochen essaie de faire comme moi : il suit un Gossip à toute vitesse, mais abandonne au bout d’1 km. ça sent la fatigue.
Finalement dans la dernière heure, c’est moi devant pratiquement tout le temps, avec Hilde et Laurent qui ont réussi à monter en marche.
Je sais qu’on va rester dans cette config jusqu’à la fin, alors je plaisante un peu : je leur demande si tout va bien et si tout le monde est bien installé...
C’est un honneur pour moi d’être locomotive, je suis tout fier. 3 tours avant la fin, Jochen me félicite : il ne pensait pas que j’allais tenir.
J’accélère pour le finish, et là je dois dire que je suis vraiment fier et ému.
Les Gossip sont en train de poser pour leur photo souvenir : je m’invite et les remercie tous, je leur explique que sans eux, je n’aurais pas gagné. Même s’ils ne m’ont pas spécialement attendu ! Disons qu’il étaient au bon endroit au bon moment et j’ai su en profiter. Mention spéciale à Robin alias le lévrier, qui patine vraiment super bien : c’est chouette de tracer derrière lui.
Je m’enquiers immédiatement de la santé d’Assem et des circonstances de l’accident :
En fait, Il se trouvait tête de train avec Laurent et Hilde derrière lui, lorsque soudain, aux relais, une patineuse (bien peu expérimentée) bifurque sur le côté (au lieu de continuer tout droit). Percute Assem à l’épaule gauche, qui vire-volte, chute lourdement sur le côté droit. Laurent qui lui tombe dessus de tout son poids (et c’est pas un léger, alors que Sessem, c’est un «extra-light») et pour couronner le tout, Hilde qui tombe encore là-dessus.
Laurent et Hilde pourront se relever moyennant de grosses écorchures et une pause pansements pour Laurent. (juste un genou éraflé pour Hilde)
Quant à Assem, après la remise des prix, il est de retour de l’hôpital.
Je le serre dans mes bras comme si c’était mon fils, marrant. Il m’a foutu une de ces trouilles, les yeux fermés, immobile dans le brancard...
Mais non, c’était juste la douleur, le dégoût d’une course interrompue si violemment. Rien de cassé, mais une sacrée râpe à fromage côté droit.
Tous mes vœux de bonne cicatrisation, Assem !
Tout au long de la course, la température n’a cessé de monter et le soleil de s’imposer. J’ai bu 3,5 gourdes de boisson isotonique Isostar 2,5 dosettes/600 ml mais cette fois-ci, sans sel, la chaleur n’étant pas trop forte.
D’ailleurs pour attraper mes gourdes au passage, c’était assez acrobatique, posées qu’elles étaient sur notre table de camping, au milieu des relais.
Mais on m’a aidé !
Douche au gymnase, chez les garçons (ah oui un des gars s’est trompé de porte et voulait aller chez les filles, mais il s’est fait correctement éconduire), puis remise des prix et remise du Challenge d’Alsace.
Bischheim et Hoenneim (les 2 maires sont présents à la cérémonie)
Et encore une fois Sanglier et moi on rentre, par l’autoroute, la tête dans les nuages…
