Les caractéristiques de la roue ne sont pas d'origine théorique ; elles se sont construites au fur et à mesure des essais et erreurs. La liste ci-dessous examine les caractéristiques principales, et s'intéresse plus particulièrement à celles qui concernent la propulsion.
Résistance aux contraintes et intégrité physique
La roue est une partie essentielle du patin qui soutient le corps du patineur ; elle doit conserver ses dimensions dans toutes les circonstances. Elle doit donc résister au poids du patineur, et résister aux chocs, à des vitesses de l'ordre de 15 m/s en patinage de vitesse, et 30 m/s en downhill.
Elasticité, amortissement
L'élasticité de la roue contribue à la résistance aux chocs ; elle contribue également à la flexion (voir plus loin). L'amortissement des chocs joue de deux façons : élevé, il atténue les vibrations transmises au patineur, mais atténue également la poussée propulsive. Plus précisément, il est souhaitable que la roue se comporte comme un filtre passe-bas, avec une bonne transmission des basses fréquences, et une bonne absorption des hautes fréquences.
Dimensions
Les roues peuvent avoir un diamètre compris entre 76 et 110 mm (2011). L'épaisseur de la gomme peut être de 20, 22 ou 24 mm ; cette dernière épaisseur est de loin la plus répandue. Cependant le noyau reste d'une épaisseur de 24 mm. Notons que pour des roulements 608, la largeur de la platine se décompose en 7+10.2+7=14.2, ce qui autorise une tolérance maximum de 0.2 mm à proximité de l'axe. Certaines platines permettent de panacher des roues de tailles différentes : ce montage est devenu fréquent depuis l'avènement des roues de 110 mm. Le montage hybride le plus courant (2011) est 110-110-100-110, mais on trouve également 110-110-100-100 et 110-100-100-110. La puissance maximum développée par le patineur dépend de son altitude au-dessus du sol, qui elle-même dépend de la taille et de l'agencement des roues.
Masse, moment d'inertie, effet gyroscopique
La roue doit être la plus légère possible : du fait du mouvement du patineur, elle est le point le plus extrême de celui-ci, et influe donc plus que toute autre partie de l'équipement en consommant l'énergie du patineur. Son moment d'inertie joue de deux façons : élevé, il favorisera les allures rapides et constantes ; faible, il favorisera les démarrages, les reprises et la vitesse en côte.
Les masses des roues en usage en 2011 sont environ : 80 mm : 76 g, 84 mm : 80 g, 100 mm : 130 g, 110 mm : 160 g.
L'effet gyroscopique est la force qui contrarie le pivotement de la roue quand celle-ci est en rotation ; à peine décelable avec des roues de 80 mm, il est élevé pour des roues de 110 mm ; dans une certaine mesure, cet effet contribue à un geste de patinage régulier, puisqu'il conduit à maintenir la platine dans un axe constant ; en revanche, il est préjudiciable aux changements rapides de direction.
Rotation
La roue doit pouvoir tourner dans toutes les circonstances ; la rotation autour d'un axe est assurée par une paire de roulements à billes, généralement de type 608 (8-22-7 mm) ; elle doit être équilibrée, ne doit pas se voiler ni se compresser de façon permanente.
Coefficients de friction
L'adhérence au sol détermine une partie importante des capacités à la propulsion de la roue.
Coefficient de friction statique : essentiellement mis en jeu lors de la poussée latérale, il doit être le plus élevé possible, et cela sur toutes les surfaces possibles. Cette condition étant contradictoire, il existe des roues spécifiques pour surfaces mouillées, c'est-à-dire à faible coefficient de friction statique.
Coefficient de friction dynamique : il doit être le plus faible possible, afin de réduire l'usure des roues. Cette exigence est contradictoire avec l'adhérence sur sol humide, c'est ce qui explique qu'une glissade, une fois déclenchée, se maintienne assez longtemps.
Coefficient de résistance au roulement : il doit être le plus faible possible, sur les surfaces les plus variées. Cette condition étant elle aussi contradictoire, les roues adaptées à la piste (surface lisse) son fréquemment différentes des roues adaptées à la route (surface rugueuse).
Roues bi-matières
Afin de réduire le poids des roues, on constitue celles-ci à partir de deux éléments :
- - le noyau, ou jante de la roue, qui ne sera en contact qu'avec le pourtour de celle-ci et les roulements
- la circonférence ou surnoyau, qui ne sera en contact qu'avec le sol et le noyau.
Cette fabrication en deux matières présente des exigences, signalées au paragraphe Flexion ci-dessous.
En toute rigueur, on devrait également tenir compte des roulements ; cependant, leur raideur est telle qu'on néglige leur impact dans les effets considérés.
Tri-matière
La croissance de la taille des roues conduit à une croissance de la quantité de matière dans la circonférence, ce qui conduit à plusieurs conséquences. A partir de 2010, les fabricants proposent des roues tri-matières, comme les roues automobiles, qui vont nous servir d'explication.
Une roue d'automobile moderne est essentiellement constituée de trois éléments :
- - une jante métallique de grande résistance mécanique, avec des propriétés élastiques élevées
- une lame d'air permettant une grande adaptation volumétrique aux contraintes, enserrée ou pas dans une chambre à air
- une bande de roulement à base de caoutchouc armé de fibre textile, qui transmet les efforts, assure la friction et maintient la lame d'air en place
- - la jante, qui dans ce cas n'a pas besoin de fléchir latéralement, peut être faite d'un matériau raide, résistant aux chocs
- la bande de roulement, essentiellement consacrée à l'adhérence, peut être faite d'un matériau à haut niveau d'adhérence, mais aux caractéristiques mécaniques moins élevées
- la lame d'air se charge de toutes les déformations en cours de fonctionnement, avec quasiment aucun frottement interne, ce qui garantit un meilleur confort, un faible bruit, une économie d'énergie.
On vise les mêmes améliorations avec les roues de roller :
- - la jante est toujours chargée de l'intégrité géométrique, de l'amortissement, et d'une partie de la flexion latérale
- un "coeur" de circonférence en matériau tendre facilite les mouvements internes à la gomme, et réduit les frottements internes ; certains constructeurs incluent un petit volume d'air à cet endroit
- la circonférence évidée est toujours chargée de l'adhérence et de la flexion latérale, mais sa déformation pour s'adapter au terrain est facilitée par la présence du coeur en matériau tendre.
Flexion : module et mécanisme
Tout matériau présente un module d'élasticité en flexion (ou module de flexion), décrivant la déformation d'un objet (généralement long) dont une extrémité est fixe, et l'autre soumise à une force normale au plus grand axe de l'objet. Les matériaux utilisés dans la fabrication de la roue présentent des modules de flexion ("raideur") faibles, c'est-à-dire que pour une petite force appliquée, on obtient une flexion élevée.
Lors du mouvement de poussée latérale, la roue se déforme latéralement par flexion latérale, mais uniquement sur le secteur de roue dont la circonférence est en contact avec le sol ; quand la roue tourne et avance de quelques centimètres, ce secteur n'est plus en contact avec le sol, et n'est donc plus sous contrainte. Il reprend alors sa forme initiale par simple élasticité ; le secteur suivant, qui a pris sa place, est alors en flexion. A chaque tour de roue, tous les secteurs vont donc être mis sous contrainte, puis relachés.
A 10 m/s (36 km/h), une roue de 100 mm effectue 32 tours/s : la roue subit ce cycle flexion-relachement 32 fois par seconde. Si l'adhésion entre le noyau et la gomme est insuffisante, le décollement de celle-ci est probable. Ce risque de décollement est d'autant plus probable que la gomme et le noyau présentent des coefficients de flexion différents ; si la jante est particulièrement raide, comme c'était le cas de certaines roues à jante aluminium, celle-ci ne va pas du tout fléchir pendant la contrainte, ce qui va créer un angle entre la jante et la gomme, conduisant à un décollement rapide. L'adéquation entre la jante et la gomme doit donc se faire sur deux plans, une compatibilité entre les matériaux d'une part, afin que l'adhésion soit bonne, et un coefficient de flexion du même ordre d'autre part, pour éviter le décollement. Le module de flexion d'une roue détermine l'angle de dérive lors de la propulsion.
Profil et empreinte
Le profil désigne l'aspect d'une section droite de la circonférence ; c'est lui qui assure le contact entre la roue et le sol quel que soit l'angle de poussée. L'empreinte est la surface de contact au sol, elle dépend de la dureté de la roue et du poids du patineur.
Les roues de vitesse ont un profil elliptique - les roues de slide sont fréquemment semi-circulaires. Ce profil conduit aux caractéristiques suivantes :
- - quand le patineur est en roue libre, la roue est verticale, la surface de contact est minimale, les frottements sont minimaux et symétriques
- quand le patineur pousse latéralement, ce n'est plus la tranche de la roue qui est en contact avec le sol, mais une zone un peu plus proche de l'axe ; l'empreinte au sol est plus élevée, le frottement est plus élevé, l'adhérence est plus élevée, et un couple de rotation s'exerce qui, jusqu'à un certain angle ("capsize"), tend à redresser le patin : la poussée peut être plus forte.
- un profil elliptique permet une flexion plus élevée à dureté identique ; on peut donc fabriquer des roues plus dures, plus résistantes à l'usure, qui vont rester efficaces.
Dureté Shore A
La dureté Shore A est une mesure normalisée de la résistance à la pénétration ; elle est fonction d'une force (d'appui) par rapport à la surface de matériau compressé ; elle est donc analogue à une pression. La dureté des roues en 2011 va de 78 à 88 pour les roues de vitesse ou de loisir, jusqu'à 98 pour des roues de freeride.
La dureté Shore A a longtemps été une mesure d'identification des roues ; elle risque d'être abandonnée avec la tendance aux roues tri-matières. Elle reste indispensable pour évaluer l'empreinte.
Evaluation de l'empreinte
L'empreinte dépend du poids du patineur, du nombre de roues et de la dureté de la gomme ; dans certaines circonstances, elle peut varier sensiblement sous l'effet d'une poussée violente.
Quand le patineur est en phase de poussée ordinaire, un seul patin est au sol à tout moment. Dans le cas d'une platine à 4 roues, la raideur de celle-ci est telle que l'on considère que le poids est réparti équitablement sur les 4 roues (ce n'est pas toujours le cas). La somme des 4 surfaces au sol est directement fonction de la dureté Shore A pour une roue bi-matière ; ce ne sera plus le cas avec les roues hybrides. Un constructeur a donc cessé de communiquer la dureté Shore A de ses roues, pour la remplacer par une évaluation de l'empreinte (qui manque de clarté).
Flexion, profil et empreinte sont les composantes essentielles à l'efficacité d'une roue ; en toute rigueur, chaque patineur devrait identifier une roue adaptée à sa puissance, son poids et le type de surface.
Freinage
Les roues de vitesse sont éventuellement utilisées pour le freinage ; cette utilisation conduit à une dégradation rapide des qualités de la roue, et doit être évitée ; voir le paragraphe Résistance à l'usure.
Résistance à l'usure
L'usure des roues déforme l'empreinte au sol, déforme le profil elliptique, modifie les conditions de flexion de la gomme, provoque des vibrations de roulement et éventuellement des pertes d'adhérence ; tous ces éléments réduisent la performance, particulièrement sur surface lisse (piste). Une bonne résistance à l'usure sera fréquemment contradictoire avec d'autres qualités. Même si une faible usure est une qualité pour le consommateur, celle-ci ne vient pas en tête de la préoccupation du sportif, et cette qualité sera fréquemment placée en dernière position.
Panachage de roues
Il est possible de panacher les roues, de façon généralement symétrique sur les deux patins. Si l'on emploie deux types de roues (neuves) de duretés différentes et de modules de flexion différents, on obtient en principe des surfaces de contact intermédiaires ; cela permet d'augmenter l'adhérence du train roulant sans sacrifier les autres qualités. A ce niveau, la raideur de la platine commence à intervenir, rendant le sujet particulièrement complexe.
Edit: texte édité pour tenir compte des remarques de lokonel et gui_gui.